YUKO HIROTA

pianiste-compositrice

 

 

Née à Tokyo, Yuko Hirota commence à étudier le piano à l’âge de trois ans. Elle obtient le diplôme de l’Académie Musashino. Cette formation classique ne l’a cependant pas coupée de ses racines japonaises : sa grand-mère paternelle était professeur de Naga-uta, le “Chant long” du théâtre Kabuki chanté en s’accompagnant du shamisen, tandis que sa grand-mère maternelle était une chanteuse du “Petit chant”, le Ko-uta, de caractère plus sentimental. Les chansons entendues au Tibet devaient d’ailleurs plus tard lui rappeler l’atmosphère du “Petit chant”. Son grand-père paternel fut l’un des premiers facteurs de piano au Japon (Y. Hirota).

Venue en Europe pour y parfaire sa formation auprès de Louis Hiltbrand, pianiste, compositeur et professeur de piano pour la Classe de Virtuosité du Conservatoire de Genève, elle y reste quatre ans pour ensuite se fixer à Paris. Elle suit à l’Ecole Normale de Musique la classe de Musique de Chambre de Serge Blanc et au conservatoire, les cours d’Harmonie, de Contrepoint et d’Analyse de Katori Makino.  Elle poursuit l’étude de la composition et de la musique traditionnelle japonaise avec Akira Tamba. Elle entame ensuite une carrière d’interprète et donne de nombreux récitals au Japon, en Suisse et en France tout en enseignant le piano à la Schola Cantorum de Paris. Maîtrisant le répertoire classique, ses compositeurs préférés restent Bach, Mozart, Schubert, Schumann, Chopin, Franck, Debussy, et son maître, Hiltbrand. Elle doit à ce dernier l’écoute de la voix intérieure, qui la poussera à rencontrer le psychanalyste Elie G. Humbert, disciple direct de C. G. Jung, et finalement à composer.

En 1998, elle a fondé un atelier de recherche, Le Son des Choses. Elle y fait entendre l’âme sonore des objets quotidiens. Elle crée des spectacles avec ses objets sonores et bien sûr, des œuvres dont l’originalité est l’utilisation du piano dans toutes ses résonances. Elle donne également des formations pour des personnes qui sont ou seront éducateurs de jeunes enfants ou éducateurs spécialisés. Elle a réalisé de nombreux spectacles-ateliers pour les enfants. Elle créé des spectacles, soit seule soit avec des musiciens ou des artistes de différents arts, comme la danse Bûto, la danse contemporaine, la calligraphie japonaise, le shakuhachi (flûte en bambou japonaise), le koto (cithare à 13 cordes japonais), la cérémonie du thé japonaise, les haïku (la poésie japonaise), la poésie, et les contes. Nombreux concerts de piano en France et au japon. Depuis 2008, directrice artistique de Piano-no-ki, elle a organisé de nombreuses manifestations dans la Yourte du Lunain à Vaux sur Lunain, en Seine et Marne. 

LA COMPOSITION ET L’ECOUTE INTERIEURE

" Je me souviens du premier enseignement de mon maître regretté, Louis Hiltbrand : " Ecoutez la voix intérieure ! "

La voix intérieure, c’est comme le sens et la valeur de ce qu’on ressent, quand cela résonne en soi. Il faut que cela résonne. Sans cette intensité, cette profondeur, cet écho, il n'y a pas de Musique, mais seulement des sons - et même pas des sons, des bruits ! Cette écoute est ce qui fait naître la Musique. Louis Hiltbrand avait su ainsi écouter la musique japonaise. C'est cette extraordinaire qualité d'écoute qui lui permit de rendre, dans une de ses compositions, l'esprit du Japon sensible à celui qui, écoutant de la même oreille, pourra laisser venir à lui cet esprit dans ce même silence intérieur. C'est cette écoute qui lui inspira ses Sept Variations sur le thème de "Saita Sakura" et Prélude, Interlude et Postlude. En fait, mon chemin s'est décidé lorsque je l'ai entendu les jouer. Je vibrais de joie. J'ai éprouvé tant d'allégresse ensuite à les jouer et à les rejouer , encore et encore, que le désir de composer se fit peu à peu sentir en moi. Je me rappelais que Schumann disait que la mission du musicien, c'est d'envoyer de la lumière. Mais il me fallut encore longtemps avant de m'autoriser à composer. Cela, je le dois à mon maître, le grand psychanalyste jungien Elie G. HUMBERT. Sa rencontre fut véritablement libératrice pour moi. Aux Langues Orientales, M. Akira TAMBA, compositeur et musicologue, qui dirige aussi des recherches au CNRS, m'a donné la chance de pénétrer davantage la musique du Japon, en particulier le Shomyo, la "Voix radieuse", le plain-chant liturgique de la récitation des sûtras bouddhiques. C'est aussi M. Tamba qui m'a encouragée à poursuivre la composition, quand j'eus enfin le courage de lui soumettre ma première œuvre, Tanka, du nom d'un type particulier de poème traditionnel japonais.

Je ne peux composer que dans le silence de l'esprit. Il me vient assez facilement ,à présent. Faire face au trouble m'y fait trouver la résonance, la réponse juste, qui le résout, me redonne mon centre, mon La. Peut-être dois-je aussi cela à mes réflexions inspirées par le bouddhisme, que j'ai approfondies. J'ai appris le tibétain plusieurs années à l'INALCO. Je suis allée au Tibet. Dans la pénombre rougeoyante des temples, il règne une telle ferveur qu'on s'y croirait dans un cœur qui bat. La détermination et la confiance immenses qui brillent dans le regard des pèlerins me transperçaient. L'atmosphère des temples au Japon n'est pas la même et cette différence des deux traditions m'a beaucoup frappée. Au Japon, c'est plutôt la paix et le dépouillement qu'on recherche. Toute petite, j'avais éprouvé un sentiment étrange de gravité solennelle en entrevoyant la pénombre silencieuse vide d'un petit temple de la forêt, dans les montagnes de mes étés d'enfance. Je n'osais approcher des bonzes noirs qui passaient au loin. Et les 108 coups de cloche que l'on sonnait à chaque fin d'année dans tout le Japon pour le purifier des 108 passions, comme ils résonnaient longtemps dans la nuit noire et froide ! Je les entends encore… J'ai essayé de les rendre dans une de mes compositions.

Dans le silence intérieur émerge au bout de mes doigts un espace sonore, une atmosphère, que je peux ensuite sculpter. Ce vide m'accouche d'images vivantes que je peux préciser ensuite peu à peu. Ensuite, mes connaissances théoriques interviennent pour structurer, élaguer et polir cette esquisse, la rendant plus dense. J'espère que l'auditeur peut alors m'accompagner dans ce dépaysement et "repaysement". Par "repaysement", je veux dire déconditionnement et donc universalisation, sans tomber pour autant dans le flou ni l'abstrait. Alors, je ne suis plus seulement japonaise, ni même femme, mais humaine. Je veux être seulement plus humaine. Se dépayser, ce serait une ouverture qui rendrait possible du jamais encore conçu

Depuis 1998, l'atelier Le Son des Choses, qu'elle a fondé, invite à la découverte du son des objets et de leur expressivité sonore. Elle donne également des formations pour des personnes qui sont ou seront éducateurs de jeunes enfants ou de personnes handicapées mentales. Elle a réalisé de nombreux spectacles-ateliers pour les enfants.

QUELQUES OEUVRES RECENTES

- Noir et Blanc, pour piano, voix et objets sonores, commande pour le Musée Matisse de Nice, en 2000, pour l’exposition « Matisse, le Noir et le Blanc de l’automne » qui a été également joué à la Sorbonne dans le cadre du colloque international “Musique et Arts Plastiques”, en 2001.

- Monde muet, poésie-concert, au Théâtre Molière-Maison de la Poésie, en 2001, qui a été rejoué à la Conciergerie dans le cadre du « Printemps des Poètes ».

- Autour de l'arboretum, poésie-concert, en 2001

- La Cloche Oubliée, conte musical en 2002, à La Halle Saint-Pierre.

- Danse Butō, Ephémères, à l’Atelier de la main d’Or, en 2001.

- Outre-temps à l’Espace Culturel Bertin Poirée (franco-japonais), en 2001, pour le festival de danse « Dance Box ».

- Le Quotidien et le sacré, pour le festival de théâtre et danse “Extrême-Orient 2001”.

- Dans le silence, pour le festival de danse “Dance Box 2004” à l'Espace culturel Bertin Poirée.

- Fleuve de Vie, concerto pour piano à 4 grandes mains et orchestre d’objets pour mains enfantines à l’Espace Graindorge, en 2005.

-  Son CD Yuko Hirota Rencontres… est sorti en 2003 dans la collection L’Oeil du Musicien et en version japonaise en 2006.

- Fondation de l'association « Piano-no-ki » (‘Arbre à piano’ en japonais), en 2006.

- Nombreux concerts de piano en France et au Japon en 2007 - 2008.

- Création "Homage à Rodin et à Matisse", rencontre danse contemporaine et de Butō au Musée Matisse de Nice en juin 2009.